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Le patron d'Orange mis en examen

Le PDG d'Orange, Stéphane Richard, le 7 juillet 2012 à Paris [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives] Le PDG d'Orange, Stéphane Richard, le 7 juillet 2012 à Paris [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]

L'enquête sur l'arbitrage dont a bénéficié en 2008 Bernard Tapie dans son litige avec le Crédit Lyonnais a pris un nouveau tour spectaculaire mercredi, le PDG d'Orange, Stéphane Richard, se retrouvant en position délicate avec sa mise en examen pour "escroquerie en bande organisée".

Matignon a immédiatement annoncé que le conseil d'administration d'Orange serait réuni "dans les prochains jours" pour "décider des conséquences à tirer" de cette décision. "A travers ses administrateurs, l'Etat fera alors valoir sa position en tant qu'actionnaire", a-t-on précisé dans l'entourage du Premier ministre.

Simultanément, une porte-parole de l'opérateur a assuré que cette mise en examen n'avait "pas de conséquences" et que M. Richard "sera à son bureau" jeudi matin.

Directeur de cabinet de Christine Lagarde quand elle était ministre de l'Economie, M. Richard, décrit par son entourage comme "confiant et combatif" malgré deux jours de garde à vue, a annoncé un recours contre une mise en examen au chef jugé "infamant et grotesque" et ne reposant "sur aucun élément sérieux", selon son avocat Me Jean-Etienne Giamarchi.

Le 29 mai, l'un des trois juges du tribunal arbitral, Pierre Estoup, a été le premier mis en examen pour "escroquerie en bande organisée".

Le tribunal arbitral a décidé en juillet 2008 d'octroyer à Bernard Tapie 403 millions d'euros, intérêts compris, pour mettre fin au différend entre les deux parties né de la vente d'Adidas. Un arbitrage que l'ancien patron du Crédit Lyonnais Jean Peyrelevade souhaite voir "annulé", a-t-il répété sur BFMTV.

Avec la mise en examen de l'ancien directeur de cabinet de Mme Lagarde, les juges semblent estimer que M. Richard a pris une part décisive dans le choix et l'élaboration de l'arbitrage rendu en faveur de Bernard Tapie.

Jean-Etienne Giamarchi (d), avocat de Stéphane Richard, et Jean-Alain Michel, avocat de Jean-François Rocchi, le 11 juin 2013 à Paris [Jacques Demarthon / AFP]
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Jean-Etienne Giamarchi (d), avocat de Stéphane Richard, et Jean-Alain Michel, avocat de Jean-François Rocchi, le 11 juin 2013 à Paris
 

Entendue par d'autres juges, ceux de la Cour de justice de la République chargée d'enquêter sur le rôle de Christine Lagarde, l'ancienne ministre avait été placée sous le statut de témoin assistée, un statut intermédiaire entre celui de témoin et de mis en examen qui peut à tout moment évoluer. Ce statut semblait reconnaître à Mme Lagarde une moindre implication dans l'arbitrage.

Réunion clé avec Guéant

Un moment clé de l'affaire paraît être une réunion tenue à l'été 2007 en présence de M. Richard, le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, et l'ex-président du Consortium de réalisation (CDR), Jean-François Rocchi, la structure chargée de gérer le passif du Crédit Lyonnais.

M. Richard avait déclaré à l'AFP qu'il s'agissait d'une "réunion de validation". Il n'y a eu "ni ordre, ni instruction, ni pression particulière" de l'Elysée, avait-il assuré. Selon le Canard Enchaîné, M. Richard a soutenu par ailleurs le contraire, évoquant une instruction transmise par Claude Guéant lors de cette réunion.

Stéphane Richard a affirmé à l'AFP que, lors de cette rencontre de 2007, il était "apparu clairement que la solution de l'arbitrage était validée par le président de la République (Nicolas Sarkozy) qui n'en a jamais fait mystère".

L'homme d'affaires Bernard Tapie le 26 mai 2013 à Marseille [Gerard Julien / AFP/Archives]
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L'homme d'affaires Bernard Tapie le 26 mai 2013 à Marseille
 

Pour le président du Modem François Bayrou, il ne fait aucun doute qu'"un accord, une approbation, (a) été donnée au sommet de l'Etat" pour cet arbitrage.

M. Guéant n'a pas été encore entendu par les enquêteurs dans cette affaire, mais son domicile et son bureau ont été perquisitionnés le 27 février.

De leur côté, M. Richard et Jean-François Rocchi se rejettent la responsabilité sur l'initiative d'envisager un arbitrage.

M. Rocchi était en cours de présentation devant les juges d'instruction mercredi en vue d'une possible mise en examen dans la soirée.

Stéphane Richard avait par ailleurs exonéré Jean-Louis Borloo, ministre de l'Economie avant Christine Lagarde, de toute responsabilité, affirmant que "la proposition d'arbitrage (était) venue du président du CDR", à l'époque M. Rocchi.

Ce dernier le conteste, affirmant qu'il n'a fait que "mettre à l'étude" à la demande de M. Richard une proposition des liquidateurs du groupe de Bernard Tapie suggérant un arbitrage. "Je n'ai donc pas pas +proposé+ d'arbitrage", indiquait récemment M. Rocchi à l'AFP.

L'ancien patron du CDR a probablement été également entendu par les enquêteurs sur le texte du compromis d'arbitrage signé entre le CDR et Bernard Tapie.

Selon un rapport de la Cour des comptes, révélé par Mediapart, ce texte n'était pas le même que la résolution entérinée par le CDR lors d'un conseil d'administration sur la demande d'indemnisation du préjudice moral par les époux Tapie. M. Tapie obtint 45 millions d'euros au seul titre du préjudice moral.

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