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Frigide Barjot débordée par sa droite

Virginie Tellene alias Frigide Barjot le 24 mars 2013 à Paris lors de la manifestation des opposants au mariage homosexuel [Pierre Andrieu / AFP/Archives] Virginie Tellene alias Frigide Barjot le 24 mars 2013 à Paris lors de la manifestation des opposants au mariage homosexuel [Pierre Andrieu / AFP/Archives]

Humoriste déjantée et lobbyiste catholique au style provocateur, Frigide Barjot a réussi pendant six mois à fédérer derrière elle le mouvement d'opposition au mariage homo avant d'être débordée sur sa droite, au point d'hésiter à manifester pour le dernier grand rassemblement.

Avec ses tenues roses, son maquillage appuyé et ses médailles pieuses, cette quinquagénaire, dont le vrai nom est Virginie Tellenne, a toujours détonné au milieu des anti-mariage homo. Mais il semble que depuis quelques temps, elle dérange carrément.

Avec la promulgation de la loi le 18 mai, qui permettra dans les jours qui viennent les premières noces, ce mouvement qu'elle voulait "joyeux" et "pacifique" est en pleine radicalisation. Et celle qui a osé dire qu'elle assisterait à un mariage homo si elle était invitée, qui s'affiche pour l'union civile, n'a plus le vent en poupe du côté des plus conservateurs.

"En l'état actuel des choses, je ne pense pas manifester dimanche", a-t-elle affirmé vendredi, ajoutant être "aujourd'hui contestée" et "plus vraiment à la tête du mouvement". "Il y a des menaces très graves qui pèsent sur moi, venant principalement de l'extrême droite", a-t-elle ajouté, précisant recevoir de la part de "gens violents" des SMS disant : "Tu ne parleras pas d'union civile".

Virginie Tellene alias Frigide Barjot, et Xavier Bongibault (Dà) le 24 mai   2013 à Paris [Fred Dufour / AFP]
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Virginie Tellene alias Frigide Barjot, et Xavier Bongibault (Dà) le 24 mai 2013 à Paris
 

"Il me semble pourtant clair que c'est la solution puisque cela permettrait de ne pas toucher à la filiation, qui est le vrai problème", a insisté Frigide Barjot, qui s'était prononcée en faveur du Pacs en 1999, à l'époque où elle avait l'habitude de passer de "folles nuits" dans les bars homo de la capitale.

Déjà après la grande manifestation du 24 mars, son autorité avait été contestée : l'un des porte-parole du mouvement, Béatrice Bourges, du collectif pour l'Enfance, avait fait scission et appelé à des actions coups de poing, estimant notamment celles de la Manif pour tous de Frigide Barjot trop "bisounours".

Depuis, les deux femmes ont coupé toute relation et Mme Bourges est devenue porte-parole du Printemps français, qui appelle à "une nouvelle résistance".

 

"Dépassée par de plus violents qu'elle"

Dans les années 80 et 90, Frigide Barjot, ancienne de Sciences-Po, issue d'un milieu très conservateur, anime avec son mari Basile de Koch, frère de Karl Zéro, le groupe Jalons, qui parodie médias et monde politique et crée des pastiches de journaux. A l'époque, elle se produit aussi parfois sur scène avec son groupe rock les "Dead Pompidou's". L'un de ses titres phare : "Fais-moi l'amour avec deux doigts".

Virginie Tellene alias Frigide Barjot le 23 avril 2013 à l'Assemglée nationale à Paris [Martin Bureau / AFP/Archives]
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Virginie Tellene alias Frigide Barjot le 23 avril 2013 à l'Assemglée nationale à Paris
 

Auteur de "Confessions d'une catho branchée" après avoir redécouvert la foi, elle entre dans la lumière médiatique en prenant la défense du pape Benoît XVI, ouvre un site internet appelé "Touche pas à mon pape" et lance le "Benoîthon".

Rompue aux techniques de communication moderne dont elle joue à la perfection, elle est ainsi devenue le porte-voix de l'Eglise dans les médias et a repris son bâton de pèlerin avec l'annonce de l'ouverture du mariage aux homo.

Mais après des mois de combat, ses détracteurs sont de plus en plus nombreux.

"C'est quelqu'un de fragile (...), elle a accumulé beaucoup de tension", dit un organisateur de la Manif pour tous.

D'après l'avocat Frédéric Pichon, proche du Printemps français, "elle est mise en minorité dans son propre mouvement et les gens n'en peuvent plus de la voir avec son drapeau arc-en-ciel. Elle n'est plus la bienvenue, donc elle se cherche une porte de sortie honorable et évoque des menaces imaginaires".

Virginie Tellene alias Frigide Barjot, le 15 avril 2013 à Paris [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]
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Virginie Tellene alias Frigide Barjot, le 15 avril 2013 à Paris
 

"Après avoir soufflé sur les braises pendant des mois, elle se retrouve dépassée par de plus violents qu'elle, mais au départ, c'est bien son mouvement qui a tout initié et qui continue les manifestations, alors que la loi est votée et promulguée", juge, sous couvert d'anonymat, un partisan du mariage pour tous, rappelant qu'elle avait osé dire après le vote au Sénat : "Hollande veut du sang, il en aura".

Les associations favorables au mariage gay estiment en effet que les mobilisations, initiées par le collectif de Frigide Barjot, ont permis une libération de la parole homophobe.

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