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Annie Girardot, la classe populaire

Annie Girardot en 1996. Elle vient de recevoir le César du meilleur second rôle féminin[CC/Georges Biard]

Annie Girardot, «le plus beau tempérament dramatique de l’après-guerre», selon Jean Cocteau, est décédée le lundi 28 février 2011 à l’hôpital Lariboisière à Paris, à l’âge de 79 ans. Selon sa petite- fille Lola Vogel, l’actrice s’est éteinte «paisiblement». Une fin à l’opposé du personnage qu’elle a incarné pendant près de soixante ans, celui d’une femme de caractère à la gouaille ravageuse, qui alternait avec autant d’envie drames et comédies.

 

Archive – article publié le mardi 1er mars 2011

 

Délaissant ses études d’infirmière, elle était entrée au Conservatoire de Paris, en sortant en 1954 avec deux prix d’excellence. Sa carrière est lancée. Dès 1960, elle côtoie les plus grands. Luciano Visconti, dans Rocco et ses frères, lui offre le rôle de Nadia, qui a changé sa vie d’actrice, mais aussi de femme. C’est sur ce plateau qu’elle rencontre Renato Salvatori, père de sa fille Giulia. Marcel Carné (Trois chambres à Manhattan), Claude Lelouch (Vivre pour vivre, Les Misérables), Gérard Oury (Le Crime ne paie pas), Michel Audiard (Elle ne boit pas, elle ne fume pas, elle ne drague pas mais …  elle cause !), Marco Ferreri (Le Mari de la femme à barbe) ou Philippe de Broca (Tendre Poulet, On a volé la cuisse de Jupiter) font ensuite travailler cette femme au look de garçonne, à l’œil pétillant et à la voix de fumeuse invétérée, reconnaissable entre mille.

 

Vidéo : Annie Girardot dans Elle ne boit pas, elle ne fume pas, elle ne drague pas mais …  elle cause ! (Michel Audiard, 1970)

 

 

Traversée du désert

Si les années 1970 la voient triompher dans les comédies, comme La Zizanie, avec Louis de Funès (Claude Zili, 1979), la suite est moins rose. Difficultés financières, décès de sa mère et problèmes de drogue de sa fille la font vaciller. Mais Claude Lelouch, qui ne l’a jamais oubliée, lui offre en 1995 un come-back couronné de succès, dans Les Misérables, césar du second rôle à la clef. En 1996, lors de la cérémonie Annie Girardot, en larmes, déclare alors son amour pour la famille du cinéma français.

 

Vidéo : Annie Girardot reçoit le César du meilleur second rôle féminin en 1996 pour son rôle dans Les Misérables

 

 

Son dernier combat contre l’oubli

« Si j’ai Alzheimer, je me jette par la fenêtre », avait prévenu Annie Girardot. Aussi quand la maladie honnie lui a été diagnostiquée en 2004, ses proches ont décidé de lui cacher la vérité. Pendant deux ans, elle a pu continuer à exercer son métier de comé- dienne, épaulée par un coach. Mais les petits trous de mémoire se sont multipliés, jusqu’au moment où elle n’a plus su ce qu’elle faisait sur un plateau.

Fin 2006, la maladie a finalement pris le pas sur ses talents, sur sa vie de femme et d’actrice. Elle a dû être admise dans une maison de retraite spécialisée. Sa famille a alors souhaité rendre public le combat de l’actrice, afin de « dissiper le nuage de terreur qui entoure ce mal », expliquait sa fille Giulia Salvatori à l’époque. Depuis, elle était devenue l’ambassadrice de cette maladie qui touche aujourd’hui un octogénaire sur cinq, soit 860 000 personnes en France. Le documentaire Annie Girardot, ainsi va la vie, de Nicolas Baulieu, diffusé la première fois en 2008, a permis aux téléspectateurs de mieux comprendre l’évolution de cette maladie et son impact sur la vie quotidienne des patients et de leur entourage. Devenue «grande cause nationale» en 2007, l’Etat a débloqué depuis une enveloppe de 1,6 milliard d’euros.

En septembre 2011, son secrétaire et ami Léo Bardon publiait Annie, te souviens-tu... un magnifique témoignage sur la vie et la carrière de cette grande actrice que le public adorait, mais qu’elle avait peu à peu oublié, au point de ne plus savoir qu’elle avait joué dans plus de 100 films.

 

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Ces plus beaux rôles

 

Rocco et ses frères (1960) – Dans ce drame culte de Luchino Visconti, Annie Girardot joue une prostituée, dont deux frères, Rocco (Alain Delon) et Simone (Renato Salvatori) tombent amoureux. Cette rivalité mènera toute une famille à sa perte.

 

 

Mourir d’aimer (1971) – Les années 1970 font d’Annie Girardot une actrice populaire et incontournable. Sous la direction d’André Cayatte, elle incarne Gabrielle Russier, un professeur qui tombe amoureux de l’un de ses élèves.

 

 

Docteur Françoise Gailland (1976) – Annie Girardot reçoit le césar de la meilleure actrice en 1977 pour sa performance dans ce drame signé Jean-Louis Bertucelli, où elle joue le rôle d’un médecin atteint d’un cancer.

 

 

La Zizanie (1978) – Claude Zidi parvient à réunir Louis de Funès et Annie Girardot. Le public est sous le charme de ce couple composé d’une militante écologiste revendicatrice et d’un industriel sans scrupule au bord de la faillite.

 

 

La Pianiste (2001) – Vingt-cinq ans après son premier césar, Annie Girardot en reçoit un troisième à l’âge de 71 ans. Le jury salue sa performance de mère castratrice, dans ce drame réalisé par Michael Haneke.

 

 

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