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Hollywood : la fabrique des monstres sacrés

Étoile de Bette Davis sur le Hollywood Boulevard à Los Angeles[CC/roleATL]

Clark Gable, Greta Garbo, Humphrey Bogart, James Dean, Cary Grant, Marlon Brando, Clint Eastwood … Ces acteurs mythiques, à la fois reconnu par le public et le milieu professionnel dans lequel il évolue, forment une branche à part à Hollywood : le club très privé des « monstres sacrés » du 7e Art. L’aura qu’ils dégagent à l’écran ainsi que leurs excès les ont fait entrer dans la légende.

 

Archives – Article publié le mardi 24 février 2009

 

Pour remplir cette condition, un «physique» est souvent nécessaire. Un visage emprunt de mystère, qui accompagne une gestuelle particulière qui a largement contribué à façonner certains monstres sacrés, à l’instar de Greta Garbo dont la beauté androgyne faisait frémir les jeunes cinéphiles de l’entre-deux-guerres », mais aussi de Steve McQueen, de Gary Cooper et de Cary Grant. Chacun incarne une facette de l’homme idéal. Tour à tour voyou, séducteur et maladroit, le monstre sacré séduit les femmes comme les hommes.

Pour le publicitaire Jacques Séguéla, «les acteurs étaient tenus par contrat, à jouer le même type de rôle. John Wayne, par exemple, a quasiment joué 155 fois le même personnage». En l’occurrence, plus les rôles sont identifiés, plus l’acteur atteint naturellement le rang de monstre sacré. «Ils dégagent une aura profondément religieuse et sont ensuite “consacrés” au vrai sens du terme», analyse Emmanuel Ethis, sociologue du cinéma à l’université d’Avignon.

Aux yeux du public, le charisme que dégagent ces acteurs dans leurs rôles finit par se confondre avec leur propre charisme. «Quelque chose d’extraordinaire se produit lorsque le personnage s’incarne tellement bien que la personne réelle et le personnage ne font plus qu’un», indique le sociologue, avant d’ajouter que«ces acteurs-là déposent leurs empreintes et fixent à jamais l’incarnation d’un personnage».

 

Vidéo : Humphrey Bogart dans Casablanca

 

 

Mais pas seulement…

Derrière leur élégance, leur prestance et leur charisme, les monstres sacrés ont également véhiculé des valeurs fondamentales aux Etats-Unis. «John Wayne, c’est le bon américain, Clark Gable, le bel américain, Humphrey Bogart, le voyou au grand cœur, Clint Eastwood l’homme tranquille», explique Jacques Séguéla.

La complicité qu’ils peuvent créer avec les metteurs en scène joue également dans la construction des monstres sacrés. Ce sont les réalisateurs qui leur donnent les rôles charismatiques, qui les accompagnent, qui les font collaborer avec d’autres grands acteurs. Les couples mythiques du cinéma américain sont d’ailleurs nés de la volonté des metteurs en scène. Les Humphrey Bogart-Lauren Bacall ou Richard Burton-Liz Taylor, couples à la ville comme à l’écran, se sont formés par l’intermédiaire d’un metteur en scène. A l’heure actuelle, cependant, la notion de monstre sacré du cinéma est plus floue. «On dira des artistes d’aujourd’hui qu’ils sont cultes, mais pas mythiques», note Jacques Séguéla.

 

Les monstres sacrés les plus emblématiques du cinéma hollywoodien

Clark Gable est l’une des plus grandes stars du début du cinéma parlant. Il accède à la notoriété avec La belle de Saïgon (1932), New York- Miami (1934), ou encore Les révoltés du Bounty (1935). Mais c’est en incarnant Rhett Butler dans Autant en emporte le vent (1939 aux Etats-Unis, sorti en 1950 en France) qu’il passe à la postérité. Sa réplique finale – « Franchement ma chère, c’est le cadet de mes soucis » (Frankly, my dear, I don’t give a damn) – a été jugé par la très sérieuse American Film Institute meilleure réplique de l’Histoire du cinéma, devant « Je vais lui faire une offre qu’il ne pourra pas refuser » (Le Parrain), « Mon nom est bond, James Bond » et « J’aime l’odeur du napalm au petit matin » (Apocalypse now).

 

Vidéo Clark Gable dans Autant en emporte le vent

 

 

Autre grand mythe de l’âge d’or du cinéma hollywoodien, Humphrey Bogart, ou «Bogie», comme il était surnommé, ne fut consacré par l’oscar du meilleur acteur qu’en 1951, six ans avant sa mort, pour African Queen de John Huston. Mais, c’est dans les années 1940 qu’il signe ses plus grandes interprétations, dans Le faucon maltais (1941), Casablanca (1942), Le port de l’angoisse (1944), Le grand sommeil (1946) ou encore Key Largo (1948).

James Dean, ou l’un des destins les plus célèbres du cinéma américain. Véritable révélation dès son premier grand rôle dans A l’est d’Eden (1955) d’Elia Kazan, il n’aura le temps d’en tourner que deux autres, La fureur de vivre (Nicolas Ray, 1955) et Géant (George Stevens, 1956), avant de trouver la mort à 24 ans, le 30 septembre 1955.

 

Vidéo : James Dean dans À l’est d’Eden

 

 

Qui prendra la relève des derniers géants?

Clint Eastwood ou Robert Redford sont unanimement reconnus comme les dernières légendes vivantes du cinéma américain. On peut légitimement se demander s’ils auront des héritiers, ou si leur espèce est en voie d’extinction. La génération des Robert De Niro ou Al Pacino semble d’ores et déjà promise au panthéon du grand écran. Et parmi les «jeunes» vedettes les plus favorablement positionnées, George ClooneyTom Cruise, Johnny Depp, Brad Pitt ou Leonardo DiCaprio bénéficient déjà d’une aura qui devrait marquer durablement l’histoire du septième art.

La question se pose plus pertinemment pour les nouveaux arrivants dans le paysage audiovisuel mondial. A l’heure où le moindre candidat d’émission de télé-réalité accède à une pseudo-célébrité aussi immédiate que fragile, où les progrès des moyens de communication raccourcissent distances et délais, et où les prétendants à une place sous les feux de la rampe n’ont jamais été aussi nombreux, la définition même du statut de star est en pleine mutation. La promptitude à accorder cette étiquette dès le premier succès au box-office n’a d’égal que la versatilité du public.

Si bien qu’aujourd’hui, alors que la notoriété n’a jamais paru aussi accessible, elle est également plus précaire. A trop manipuler la notion de star, de culte, de mythe, on l’a en quelque sorte galvaudée et dénaturée. Dès lors, c’est peut-être la capacité à durer, à occuper le plus longtemps possible le devant de la scène, qui distinguera à l’avenir la star parmi les stars. Bien malin, qui pourrait prédire quels représentants de la génération montante marqueront l’époque de leur empreinte.

 

Vidéo : Alain Delon dans Plein Soleil de René Clément

 

 

Qui sont les mythes tricolores ?

Les chefs de file de la génération qui a signé les premiers grands classiques ont pour nom Raimu, Louis Jouvet ou encore Michel Simon. A partir de la fin des années 1930, l’apparition d’une nouvelle école de réalisateurs permet de découvrir de nouveaux visages. Des années 1930 aux années 1950, Jean Gabin, Jean Marais, Louis de Funès ou Lino Ventura deviendront rapidement, chacun dans des registres différents, les nouvelles têtes d’affiche du septième art français.

Ce n’est que dans les années 1960 que le statut de star – tel qu’il est apparu aux Etats-Unis avec l’âge d’or du cinéma hollywoodien – peut être associé à des comédiens français. Jean-Paul Belmondo et surtout, Alain Delon, qui s’illustrent dans des polars ou des films d’aventure en sont les premiers exemples. Depuis, seul Gérard Depardieu semble en position de prétendre au titre de monstre sacré.

 

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