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Jean-Claude Carrière : « l’histoire est toujours une réinvention du passé »

Jean-Claude Carrière[Capture d'écran Youtube ]

En 2009, Jean-Claude Carrière et Bernar Yslaire publiaient conjointement Le ciel au-dessus du Louvre, une bande dessinée ambitieuse qui s’interroge sur les rapports entre art et pouvoir durant la Révolution. Direct Matin les avait rencontré.

 

Archives – Article publié le jeudi 19 novembre 2009

 

Qu’est-ce qui vous a poussé à travailler ensemble?

Jean-Claude Carrière : La bande dessinée est un langage inventé au XXe siècle, digne de tous les autres langages. L’image et le monde y ont un rapport unique. Je me suis dit que je pouvais peut-être apporter ma pierre à l’édifice. Bernar m’a proposé de travailler avec lui parce qu’il avait vu Danton, d’Andrzej Wajda, dont j’ai été le coscénariste. Il m’a demandé de respecter ses exigences. J’ai trouvé cela passionnant.

Bernar Yslaire : Je voue une admiration sans bornes à Jean-Claude. J’ai appris comment on construisait un scénario en lisant ses interviews. Cette BD historique était l’occasion de le rencontrer, car je sais qu’il connaît vraiment bien la Révolution française. Mais je savais aussi que son regard sur la spiritualité pouvait être formidable.

 

Art, révolution et spiritualité sont au cœur de cet ouvrage. N’est-ce pas paradoxal ?

B.Y. : Robespierre va découvrir qu’aucune société ne peut vivre sans morale, sans guide. Après avoir instauré la Terreur, obsédé par le vice et la vertu, il veut instaurer la fête de «l’être suprême» et confie cette mission au peintre David. Mais comme pour la Terreur, on a voté l’existence de ce nouveau «dieu». C’est assez absurde !

 

Où commence l’histoire et où s’arrête la fiction ?

B.Y.: Le décret de l’être suprême a vraiment existé et la majorité des dialogues proviennent de véritables discours, qui ont été mis en scène. C’est une interprétation de l’histoire. N’importe quel historien reconnaîtra, avec un peu de bonne foi, que l’histoire est toujours une réinvention du passé.

J.-C.C. : L’histoire est changeante. Le passé nous réserve davantage de surprises que l’avenir. Ainsi, au XIXe siècle, Danton était considéré comme le grand homme de la Révolution. Le blason de Robespierre a commencé à être redoré au début du XXe siècle.

 

Cette bande dessinée porte aussi sur les relations entre art et pouvoir...

B.Y.: Parler de David permet de comprendre son processus de création. C’est un personnage ambigu, ambitieux. Sa peinture, à cette époque, est une parenthèse dans son œuvre.

J.-C.C. : C’est la première fois, dans l’histoire du monde, que la peinture est confrontée à un problème de métamorphose : elle passe à ce moment-là au service de la nation, «héroïque». La peinture communiste du XXe siècle va se fourvoyer dans les mêmes travers.

 

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