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La Chine, un Eldorado difficile d'accès pour l'industrie du cinéma

Les réalisateurs allemand et américain Tom Tykwer et Lana Wachowski lors de la promotion de leur film "Cloud Atlas", à Pékin le 21 janvier 2013 [Str / AFP/Archives] Les réalisateurs allemand et américain Tom Tykwer et Lana Wachowski lors de la promotion de leur film "Cloud Atlas", à Pékin le 21 janvier 2013 [Str / AFP/Archives]

Depuis quelques années, la Chine est devenue l'un des marchés les plus attractifs pour l'industrie mondiale du cinéma mais censure, bureaucratie et piratage sont autant de chausse-trappes pour les films étrangers, selon des experts interrogés par l'AFP.

"En matière de cinéma, la Chine est un cas extrêmement complexe", résume avec philosophie Jérôme Paillard, le directeur du marché du film de Cannes, le plus important au monde avec ses 10.000 acheteurs.

D'un côté, la Chine explore les possibilités de production de films susceptibles d'intéresser le marché international, de l'autre elle est à la recherche de films pour accompagner la montée en puissance du Youtube chinois, Youku et son service de VOD (vidéo à la demande).

Pour les Occidentaux, "il s'agit d'élargir l'approvisionnement du pays au-delà des films américains", poursuit l'expert, mais rien n'est simple.

"Les professionnels du film deviennent très prudents avec la Chine et pas seulement à cause des politiques strictes de censure mais aussi en raison des mesures protectionnistes tout aussi strictes pour protéger la production nationale", assure Robert Cain, un producteur américain qui travaille avec la Chine depuis 25 ans.

Les recettes des entrées en salles l'an dernier en Chine ont grimpé de 30% à 2,7 millions de dollars, en faisant le deuxième marché au monde derrière les Etats-Unis.

Sur les dix dernières années, la Chine a plus que décuplé son nombre d'écrans à plus de 13.000 à la fin 2012. Cela ne représente encore que un écran pour 220.000 personnes, contre un pour 9.000 aux Etats-Unis.

Pour autant, l'accès aux films étrangers est réduit à la portion congrue. 34 sorties autorisées, soit un gain de 14 films en 2012 après de grosses pressions des Etats-Unis sur l'OMC.

Les films français? "C'est entre 3 et 7 par an mais on ne désespère pas de faire mieux", lâche Eric Garandeau, le patron du Centre national du cinéma (CNC).

Eviter les trois T: Tibet, Tiananmen et Taïwan

La France compte par exemple sur les accords de coproduction signés avec Pékin. Le système permet à un film français tourné en Chine d'être considéré comme chinois et donc a priori de contourner les quotas.

Mais ce n'est pas tout. "Quand on veut distribuer un film en Chine, il y a toujours des discussions avec les organismes d'Etat qui délivrent les visas. Il vaut mieux éviter de parler des trois "T": Tibet, Tiananmen et Taïwan", poursuit-il. De sexe aussi.

"Cloud Atlas", film de science-fiction germano-américain avec Tom Hanks en a fait les frais récemment. Et pourtant des investisseurs chinois avaient mis plus de 10 millions de dollars dans la production, en faisant le plus gros investissement financier chinois dans un film étranger.

Quelque 40 minutes du film ont été coupées pour extirper tout ce qui pouvait parler ou l'évoquer l'homosexualité. Le dernier James Bond "Skyfall" tout comme "Django Unchained" ont été aussi amputés pour des raisons diverses, violence ou sexe.

"Mais je vous parie qu'on peut voir le film en entier sur internet", selon la coréalisatrice de "Cloud Atlas" Lana Wachowki, citée par un site chinois officiel.

"C'est extrêmement stressant et inquiétant pour un producteur ou un vendeur occidental de signer un contrat avec la Chine. Le risque est relativement probable qu'à un moment donné le film soit stoppé par la censure", poursuit Jérôme Paillard.

La piraterie est telle également que lorsque un accord est conclu, le distributeur fait en gros une croix sur des recettes futures.

Côté création, des relations se nouent de plus en plus de chaque côté. Ainsi le réalisateur Jean-Jacques Annaud ("L'Ours", "La guerre du feu") tourne actuellement en Mongolie "Wolf Totem" pour China Film group, d'après un best-seller chinois.

A Cannes, six jeunes réalisateurs chinois ont participé à un nouveau programme spécial destiné à les familiariser avec le marché mondial du cinéma, et à leur apprendre à savoir se vendre.

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