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Dans la grotte Baume Latrone

Photo fournie par l'archéologue Marc Azema le 26 mars 2013, montrant des dessins peints à la main dans la grotte de Baume Latrone (Gard) [Marc Azema / Marc Azema/AFP] Photo fournie par l'archéologue Marc Azema le 26 mars 2013, montrant des dessins peints à la main dans la grotte de Baume Latrone (Gard) [Marc Azema / Marc Azema/AFP]

Lions des cavernes, mammouths, bouquetins, cerfs... peints avec la main enduite d'argile font de Baume Latrone à Russan Sainte-Anastasie, près de Nîmes, une grotte unique au monde pour les chercheurs qui l'ont datée récemment à plus de 37.000 ans, le même âge que Chauvet (Ardèche).

"La main utilisée comme un pinceau, c'est inédit pendant la préhistoire. Dans le club très fermé des quatre cinq grottes de la même période aurignacienne comme Chauvet, Castanet (Dordogne) ou Coliboaia (Roumanie), l'outil pour le dessin c'était le fusain à ocre rouge et la gravure", explique à l'AFP l'archéologue Marc Azéma.

A 240 m sous terre, Baume Latrone débute par six empreintes de mains, appelées mains positives, que les spécialistes ont tendance à considérer comme des mains droites. Puis en avançant d'une quinzaine de mètres s'ouvre une grande salle sur le plafond de laquelle est dessinée une vingtaine d'animaux: les lions, mammouths, bouquetins, cerfs mais aussi certains qui restent encore aujourd'hui indéterminés.

"Il y a une composition circulaire organisée autour d'un grand félin, un lion des cavernes (disparu à la fin de l'ère glaciaire, soit -10.000) en train de rugir et entouré de mammouths", décrit le scientifique, estimant que les dessins "ressemblent à de l'art contemporain".

Si la grotte Chauvet est plus marquée par "le réalisme" alors que la Baume Latrone va "vers l'expressionnisme", il y a malgré tout des ressemblances entre certains dessins des deux cavités. Au point de penser que le ou les artistes sont communs ?

"Ce ne sont pas obligatoirement les mêmes individus. On peut imaginer que les deux grottes ont été fréquentées par les mêmes groupes humains, partageant les mêmes préoccupations +religieuses+, ayant la même culture", répond M. Azéma.

Charbon de bois

Photo fournie par l'archéologue Marc Azema le 26 mars 2013, montrant des dessins peints à la main dans la grotte de Baume Latrone (Gard) [Marc Azema / Marc Azema/AFP]
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Photo fournie par l'archéologue Marc Azema le 26 mars 2013, montrant des dessins peints à la main dans la grotte de Baume Latrone (Gard)
 

Dans les gorges du Gardon, Baume Latrone a été découverte en 1940, la même année que Lascaux (17.000 ans), par des lycéens. Étudiée en 1941 par les archéologues, elle est restée sans protection et a subi des dégradations avant d'être fermée au public dans les années 1970 puis de bénéficier d'une restauration en 1982-1983.

C'est en 2009 que des membres de l'équipe Chauvet, de l'université de Toulouse Le Mirail et de la DRAC ont décidé de se pencher sur la cavité gardoise. Avec comme ambition de savoir s'il pouvait y avoir une corrélation entre les deux grottes distantes seulement d'une soixantaine de kilomètres à vol d'oiseau.

Très vite, beaucoup d'éléments ont laissé penser aux scientifiques que les périodes étaient similaires: le lion de taille démesurée par rapport aux mammouths, la présence de ces mammouths absents dans des grottes plus récentes (Lascaux ou Cosquer, à côté de Marseille)... Encore fallait-il prouver que cette hypothèse était valable.

Cette confirmation a été rendue possible l'année suivante avec la découverte par un archéologue de la DRAC, Philippe Galant, d'un petit bout de charbon protégé par de la calcite à proximité du plafond. L'analyse au carbone 14 a alors permis en juillet 2012 (publication scientifique en 2013) une datation à 37.464 cal BP (années calibrées).

"C'est un grand coup de chance. Jamais on n'aurait pensé trouver ce genre de témoignage", se félicite Marc Azéma, admettant qu'il s'agit d'une datation indirecte. "Mais cette datation n'est pas un hasard. Elle a confirmé tous les autres éléments que nous avions", précise-t-il.

En avril, les recherches dans la cavité gardoise vont reprendre. Parmi les sujets de recherche, les archéologues veulent déterminer si l'argile des empreinte des mains à l'entrée est le même que celui utilisé pour les animaux. Si c'est le cas, "il y a un lien entre les deux", constate M. Azéma. Restera ensuite à résoudre un mystère: comprendre lequel.

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