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Antoine de Caunes : " Chez les rockeurs, j’aime bien que ça gratte, que ce soit insolent"

Antoine de Caunes est depuis toujours un passionné de rock[Capture d'écran Youtube]

Nommé à la tête du Grand Journal de Canal +, Antoine de Caunes n’en oublie pas sa passion : la musique rock. Le rock, Antoine de Caunes est tombé dedans quand il était petit et n’en est plus jamais ressorti. En 2010, Direct Matin l’avait rencontré à l’occasion de la sortie de son « Dictionnaire amoureux du Rock ».

 

Archives – Article publié le 7 décembre 2010

 

Antoine de Caunes  est le fils de deux personnalités du petit écran : la speakerine Jacqueline Joubert et le journaliste Georges de Caunes. Mais c’est bel et bien son talent, son humour corrosif sublimé d’un maniement expert de la plume et du verbe qui ont permis à Antoine de Caunes de se faire un nom dans le monde de la télévision et au-delà.

 Il fait ses premiers pas sur Antenne 2 à la fin des années 1970 où, à 25 ans, il crée et présente la première émission consacrée au rock en France (Chorus). Chaque dimanche, de 1979 à 1982, il accueillait pour jouer en live et en public le meilleur de la scène musicale internationale. "A l’époque le choix, c’était la grosse variét’ pourrie, Dalida, Mireille Mathieu… qui squattaient l’antenne, ou bien Herbert von Karajan chez Chancel. Entre les deux, toute cette musique (le rock) qui concernait une génération, silence total. Les 40 minutes pour laisser la parole à des musiciens s’exerçant sur ce terrain ont été perçues comme une espèce de perfusion, un peu d’oxygène".

Véritable passionné de musique rock, il livre ses souvenirs et ses rencontres avec beaucoup d’humour et une plume très affûtée dans le Dictionnaire amoureux du rock. "Ce n’est pas un livre de souvenirs ou des mémoires cachées. J’essaie de parler de cette musique et de parler de la manière dont elle se mêle à mon existence. Si j’étais un film, ce serait ma bande-son", explique l’auteur.

 

Pour réaliser le Dictionnaire amoureux du rock, comment avez-vous travaillé ?

Antoine de Caunes : Très simplement. Je suis parti du concert des Beatles auquel j’ai assisté en 1964 à l’Olympia et tout en écrivant, j’ai bifurqué pour finalement me retrouver à parler de Karen Dalton.

 

Cela s’est donc fait assez naturellement ?

A. d. C. : Assez intuitivement. Au final, je suis arrivé chez l’éditeur avec pas moins de sept cent trente feuillets. Mais je me suis rendu compte que je ne parlais pas, entre autres, de Jimi Hendrix et de Brian Wilson… La sélection s’est faite d’elle-même et à un moment j’ai fait ce constat : "M…, j’ai laissé ça de côté, il va falloir que j’y revienne".

 

Vous êtes à la fois passionné et connaisseur. Dans quel état d’esprit l’avez-vous écrit ?

A. d. C. : L’idée, c’est que ça puisse être lisible par des connaisseurs, mais aussi par des novices pour qui le sujet est vague. C’était un gros travail d’écriture. Quand je commence à gratter, je ne lâche pas le morceau tant que je n’ai pas obtenu l’effet que je cherche, et ça peut être à un mot près.

 

 

Parlez-nous un peu de Whoa Babe…

A. d. C. : Juste devant ou derrière les Shaggs, un trio américain féminin dont je parle dans le livre, qui est considéré comme le pire groupe de l’univers, il y a Whoa Babe, mon groupe à moi. J’y officiais à la batterie. J’ai lâchement sauté sur l’opportunité pour inscrire ce pauvre petit groupe dans une certaine postérité entre Paul McCartney, Bruce Springsteen et Joe Strummer.

 

Vous n’êtes pas tendre avec Bono. Qu’avez-vous contre lui ?

A. d. C. : Il m’énerve. Dès qu’il y a un problème dans le monde, Bono se manifeste, avec ses lunettes Bulgari. Chez les rockeurs, j’aime bien que ça gratte, que ce soit insolent. Depuis que le livre est sorti, je me suis rendu compte que tout le monde était soulagé par le fait qu’on puisse ne pas s’extasier sur Bono errant dans la savane avec ses malles Vuitton. Il y a quelque chose dans le personnage qui prête le flanc à la plaisanterie et au mauvais esprit.

 

Et ça, c’est toujours bon à prendre…

A. d. C. : Il ne faut jamais s’en priver. Chez moi, c’est une ligne de conduite.

 

Dans votre dictionnaire, il y a peu de femmes. Qui est misogyne ? Vous ou le rock ?

A. d. C. : Je peux vous assurer que je ne suis pas misogyne ! A l’époque où j’ai commencé à me passionner pour le rock, les filles étaient minoritaires. Ça ne veut pas dire qu’il n’y en a pas, regardez les Patti Smith, Janis Joplin, Debbie HarryDans le milieu du rock, c’est vrai que la parité, ce n’est pas encore ça.

 

Et vous, qui vous a transmis cette passion pour la musique ?

A. d. C. : J’ai baigné dans un environnement familial propice. Pas du côté paternel parce que mon père (Georges de Caunes était journaliste et le co-créateur du premier journal télévisé, ndlr) n’aimait que l’opéra et s’estimait victime d’une vocation contrariée. Il était persuadé d’être un grand ténor à côté duquel le monde était passé. Mais pas moi, car il se rattrapait quand on était en voiture ! Ma mère (Jacqueline Joubert, ndlr) était très mélomane. Elle avait une passion pour le swing et le jazz chanté américain : Ella Fitzgerald, Gershwin et le bon versant de la chanson française de l’époque avec Serge Gainsbourg, Charles Trenet, Georges Brassens, Jacques Brel.

 

Votre émission Chorus était diffusée le dimanche midi (de 1979 à 1982, ndlr). Drôle de créneau…

A. d. C. : Oui, entre la messe télévisée et L’école des fans. C’était l’ouverture de Dimanche Martin. Un non-créneau, on dirait. A cette heure-là, on ne gênait personne. Le seul horaire disponible, mais tellement extravagant qu’en fait, il est devenu un vrai rendez-vous.

 

 

A l’époque, vous apportiez un ton nouveau à la télévision.

A. d. C. : C’est ce qu’on m’a dit, mais je n’en tire aucune vanité parce que ce ton-là, il était fait de maladresse et d’absence totale de métier. Je ne me destinais pas à ça. J’étais d’une timidité maladive et devant une caméra, j’étais comme un lapin, tétanisé. Donc, je ne sais pas si tout cela a fini par faire un ton, mais ce qui est certain, c’est que je n’essayais pas de jouer l’animateur.

 

Aujourd’hui, ça pourrait exister une émission de rock à la télévision ?

A. d. C. : Bien sûr, je pense que oui. Mais apparemment, on n’est pas beaucoup à le penser.

 

Et vous, pourriez-vous présenter à nouveau une telle émission ?

A. d. C. : Non, aujourd’hui, il y a prescription. Je pourrais la présenter avec un déambulateur (rires).

 

Faut-il être jeune pour présenter une émission de rock ?

A. d. C. : Il faut que ce soit fait par des personnes qui ont 25 ans et qui ne se satisfont pas des émissions qu’ils voient à la télévision, comme le retour de Champs-Elysées. Parce que là, on est un peu dans une faille spatiotemporelle.

 

Dans trente ans, de quels groupes contemporains parlerez-vous ?

A. d. C. : De Them Crooked Vultures, de Damon Albarn et Gorillaz, d’Avett Brothers et de Timber Timbre.

 

Vidéo : Découvrez l’émission Chorus sur le site de l’INA

 

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