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75 ans après "Blanche-Neige", le dessin animé prend au sérieux les enfants

Une femme habillée en Blanche-Neige lors d'une cérémonie organisée par Disney, en 2010 à New York [Jemal Countess / Getty Images/AFP/Archives] Une femme habillée en Blanche-Neige lors d'une cérémonie organisée par Disney, en 2010 à New York [Jemal Countess / Getty Images/AFP/Archives]

Une princesse rebelle, un petit Africain qui s'attaque aux préjugés, un ours et une souris marginaux adorés des enfants et des parents: 75 ans après "Blanche-neige et les sept nains" (1937), les dessins animés n'ont plus ni tabous ni frontières et prennent les enfants au sérieux.

"Depuis Walt Disney et ses historiettes qui évitaient les sujets graves, on a changé de planète et de siècle", juge Michel Ocelot, le père de "Kirikou", petit Africain apparu en 1998 au cinéma, dont les aventures ont marqué "un tournant", s'accordent à dire les professionnels interrogés par l'AFP.

En 40 ans, "on est passé du dessin artisanal gouaché à la main à l'image de synthèse, 3D, avec un rythme de production accéléré, l'hégémonie des studios Disney est tombée", souligne Frédéric Nagorny, professeur d'animation à l'école des Gobelins.

Et "la grande différence, ajoute M. Ocelot, c'est qu'on ne prend plus systématiquement les enfants pour des imbéciles. Quand il y a des princesses comme +Rebelle+ (de Mark Andrews, Brenda Chapman, 2012, Disney/Pixar), elles ne disent plus +amen+".

"On rit et on rêve beaucoup, mais les histoires intègrent le réel dans des contes modernes. On peut tout raconter, ce qui va, mais aussi ce qui ne va pas", analyse Marguerite Abouet, auteure de la bande dessinée "Aya de Yopougon", l'histoire d'une jeune Ivoirienne dont l'adaptation au cinéma est prévue pour 2013.

Le réalisateur Michel Ocelot, en 2004 à Angoulême [Alberto Bocos / AFP/Archives]
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Le réalisateur Michel Ocelot, en 2004 à Angoulême
 

"Même chez Disney, c'en est fini des histoires pour +petits enfants mignons+. On parle d'environnement, d'indépendance des filles. C'était inconcevable il y a encore quelques années", renchérit M. Ocelot.

De "Toy story" au "Lorax", de "Moi, moche et méchant" à "Là-haut", de "Shrek" à "Kirikou", du "Jour des corneilles" à "Ernest et Célestine", les héros ressemblent à des citoyens lambda.

Jouets, animaux, monstres, enfants, adolescents, vieillards..."Ils ont des soucis comme tout le monde, essaient de vivre avec les autres qui sont souvent les méchants - parents, voisins, école. On s'identifie à eux", ajoute Marguerite Abouet.

Les sorcières craquent

Enfant noir, minuscule, tout nu et très rapide, Kirikou vit dans un village africain imaginaire. Sa bonté et sa grande intelligence lui permettent d'apporter toutes sortes de bienfaits aux habitants. Pourtant, dit Michel Ocelot, la première histoire, "Kirikou et la sorcière" (1998) "est basée sur le viol collectif d'une jeune femme".

"Ca commence très dur mais j'en fais un conte plutôt rassurant. Je parle de pourquoi les gens sont méchants, du pardon, de ne pas gober n'importe quelle explication. Dans le dernier épisode (Kirikou et les hommes et les femmes), sorti en octobre, j'aborde le racisme, et Karaba (la sorcière) craque, elle n'en peut plus de sa solitude".

Même lorsqu'il s'agit de super héros, ce qui est plus souvent le cas aux Etats-Unis, "ils sont tournés en dérision, les codes sont détournés", dit M. Nagorny. Ce qui fait le succès mondial de +Shrek+ est aussi au coeur des +Cinq légendes+", dernier opus du studio DreamWorks. Le père Noël, tatoué, y fait équipe avec un lapin de Pâques armé d'un boomerang et d'oeufs explosifs.

Dans "Ernest et Célestine" (écrit par Daniel Pennac et réalisé par Benjamin Renner, Vincent Patar et Stéphane Aubier), dessin animé à l'aquarelle adapté d'albums pour enfants, un ours marginal, musicien et clown, rencontre une petite souris qui rêve de devenir peintre ou dessinatrice, alors qu'on la destine au métier de dentiste.

Exit, alors, "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants" ? "Aujourd'hui c'est plutôt +ils se marièrent, eurent des enfants, divorcèrent, s'intéressèrent aux autres et essayèrent de vivre dans un monde qui va très vite+", s'amuse Marguerite Abouet.

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