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NBA : Les 8 évènements qui ont convaincu Kevin Durant de signer aux Warriors

Kevin Durant et Stephen Curry sont désormais coéquipiers à Golden State. [EZRA SHAW / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP]

Le 4 juillet 2016, une onde de choc vertigineuse a secoué la NBA lorsque Kevin Durant a annoncé sa décision de signer avec les Golden State Warriors. Un choix éminemment critiqué par certains, acclamé par d’autres, mais dont l’origine remonte à 2010.

Pourquoi un joueur de la trampe de Kevin Durant a-t-il choisi de rejoindre une équipe aussi formidable que celle des Warriors alors que sa propre équipe semblait si proche de pouvoir les battre à la régulière pas plus tard que lors de ces playoffs 2016 ? Cette question – et bien d’autres – animent les débats depuis que l’ancien joueur du Thunder a officialisé son départ pour San Francisco.

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Pour info, ce n’est que la 4e fois de l’histoire que les deux derniers MVP en titre (Durant en 2014, Curry ces deux dernières saisons) se retrouvent dans la même équipe, les trois autres étant Moses Malone et Julius Erving en 1982-83 et 1983-84, ainsi que Bill Russell et Bob Cousy en 1958-59.

Quelques heures après cette décision fracassante qui va modifier durablement le visage de la ligue pour les saisons à venir (sans exagération), il est toutefois possible de donner du sens au choix de Kevin Durant. Comment ? En remontant la chronologie des événements depuis la signature de son premier contrat en tant qu’agent libre avec le Thunder d’OKC. L’objectif n’étant pas ici de justifier quoique ce soit, mais plutôt de suivre le raisonnement possible qui se cache derrière cette décision qui, quoiqu’on en pense, a très certainement été difficile à prendre pour Kevin Durant.

LeBron James et «The Decision»

Le 8 juillet 2010, LeBron James annonçait sa décision de rejoindre le Heat de Miami lors d’une émission baptisée «The Decision» diffusée en direct sur la chaîne de télévision américaine ESPN. Visiblement ému d’officialiser son choix devant des dizaines de millions de téléspectateurs, LeBron James expliquait alors qu’il estimait que ce choix lui offrait la meilleure opportunité de gagner, non pas un titre, mais plusieurs.

Cette décision n’a pas manqué de laisser rapidement place à la colère et aux insultes d’une partie des fans. Pourquoi un joueur de cet magnitude faisait-il le choix de rejoindre le Heat, et deux de ses principaux adversaires au sein de la conférence Est – Wade était déjà au Heat, Bosh quittait les Raptors – pour s’assurer un titre qui, sans aucun doute, perdait automatiquement de sa saveur à cause de cette union illégitime ? La suite, tout le monde la connaît.

Un jour avant ce grand show télévisuel, Kevin Durant, alors âgé de 21 ans, annonçait sobrement sur Twitter sa décision de signer un contrat de 5 ans avec le Thunder d’Oklahoma City.

Quelques jours plus tard, Durant se permettait même de se moquer gentiment de ces réunions de stars tentant de chasser des titres ensemble, au risque de compromettre la compétitivité de la ligue. Il devenait alors l’antithèse de LeBron James, le symbole du joueur loyal en opposition au traître ayant décidé de «s’offrir» un titre.

Six ans plus tard, le voilà pourtant en train de s'engager avec les Golden State Warriors, une équipe qui a remporté le titre en 2015 et joué la finale NBA cette saison. Comme James à l’époque, Durant s’offre l’opportunité de remporter plusieurs titres. Et tout de suite. Grâce (ou à cause) de ce précédent dans l’histoire récente de la ligue, il sait que le flot de critiques, voir d’insultes, qu’il reçoit actuellement s’essoufflera avec le temps. Au gré des victoires au sein de sa nouvelle équipe.

Ironiquement, les rôles de LeBron James et Kevin Durant sont aujourd’hui complètement inversés. Le «Chosen One», qui a conduit les Cavaliers au titre cette saison après un retour triomphal à Cleveland en 2014, a atteint le statut de légende vivante tandis que KD vient de passer du côté obscur de la force.

La Team USA 2010

En 2010, la Team USA assemble une équipe privée de ses principales stars – James, Bryant, Paul, Anthony, entre autres, sont absents – pour participer au championnat du monde organisé à Istanbul. Dans cette équipe se trouvent Kevin Durant et Russell Westbrook, les deux joyaux du Thunder. Mais aussi Andre Iguodala – alors avec les Sixers de Philadelphie – et Stephen Curry, qui vient à peine d’achever sa première saison avec les Golden State Warriors.

Comme le rappelait Marc Stein du site ESPN trois jours avant l'annonce, les trois futurs coéquipiers se seraient découverts de nombreuses affinités durant cet été passé à conquérir la médaille d'or face au reste du monde. Notamment sur le plan de la foi (tous les trois sont très croyants).

Kevin Durant serait également devenu ami avec Draymond Green au fil des années. Ce dernier a d’ailleurs reconnu dans une interview avec le site Sports Illustrated avoir passé l’année à tenter de convaincre Durant de rejoindre les Warriors par texto, ou lors de leurs discussions, en lui expliquant à quel point l’ambiance au sein de l’effectif était bonne et comment ils prenaient tous du plaisir à jouer ensemble. Et qu’il était le bienvenu pour partager tout ce bonheur.

Le «Lock-out»

En 2011, un an après la réunion de James, Wade et Bosh à Miami, la NBA décide de renégocier la convention collective avec les représentants du syndicat des joueurs. Un des principaux objectifs de David Stern, commissionnaire de la ligue à l’époque, est alors d’assurer plus de compétitivité entre les franchises en empêchant la formation des «superteam» comme le Heat.

Pour ce faire, il est décidé d’instaurer une limite salariale plus contraignante tout en offrant la possibilité aux clubs plus modestes de disposer d’avantages contractuels non-négligeables (possibilité de prolonger un contrat pour 5 ans au lieu de quatre si le joueur quitte le club, avec des salaires plus importants, des pénalités financières conséquentes pour les clubs qui cumulent des salaires élevés, etc.) censés leur permettre de garder les joueurs qu’ils estiment indispensables dans leur effectif. Des objectifs qui ne seront atteints qu’après une longue période de grève - le «lock-out» donc - qui raccourcira de manière significative la saison 2011-2012 (seulement 66 matches seront joués cette saison là).

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Où est le problème alors ? Deux choses se sont passées depuis. La première : La NBA n’a pas su (pu ?) anticiper la hausse vertigineuse des revenus engendrée par le contrat mirobolant (24 milliards de dollars sur 9 ans) signé pour les droits TV et digitaux, dont l’impact se fait directement sentir sur la limite salariale. Celle-ci est en effet directement liée à l’entrée d’argent qui irrigue la ligue chaque saison. Résultat, comme le prouve le montant historique des contrats signés pendant cette intersaison, toutes les équipes disposent d’une marge de manœuvre sans précédent pour signer les joueurs à leur convenance.

Deuxième point : la mise en place d’une limite salariale soi-disant prohibitive par la NBA implique que les joueurs privilégient le choix de l’argent sur tout le reste. En résumé : «Si tu veux toucher le maximum de billets verts, tu restes dans ton équipe». Mais déjà en 2010, Wade, James et Bosh avaient consenti à sacrifier une partie de leurs salaires pour permettre à Pat Riley de construire un effectif viable autour de leurs talents individuels.

Comme d’autres avant lui, Kevin Durant vient de faire une croix sur une somme d’argent colossale pour signer avec les Warriors. Il est important de rappeler que les superstars de la NBA sont déjà rémunérées comme des Dieux par leurs sponsors, et certains, comme Durant, ne rechignent pas à l’idée de laisser derrière eux plusieurs dizaines de millions de dollars pour pouvoir mener leur carrière comme bon leur semble.

Le «trade» de James Harden

Bill Simmons, célèbre commentateur aux Etats-Unis, l’avait prédit. En octobre 2012, le journaliste exprimait son dégoût suite au transfert de James Harden aux Houston Rockets. Pour lui, le Thunder d’Oklahoma City allait maudire ce jour où il venait de «briser» ce trio débordant de promesses que constituaient Durant, Westbrook et Harden. Pour illustrer cette erreur monumentale selon lui, il ajouté dans son papier une capture d’écran des trois joueurs bras-dessus-bras-dessous à la fin du Game 5 des NBA Finals de 2012 qui, malgré la défaite, représentait l'avenir radieux de la franchise. Trois stars, à peine dans leur vingtaine, prêtes à prendre le contrôle de la NBA.

©Capture d'écran Youtube - ESPN/ABC

Le fait est que, depuis ce jour, le Thunder n’est jamais retourné en finale NBA. Pis, ils ont vu les Warriors sortir de nul part pour prendre leur place dans le rôle de «l’équipe du futur». Une équipe composée elle-même d’un trio aussi séduisant, sinon plus, que celui d’OKC à l'époque avec Klay Thompson, Draymond Green et Stephen Curry bien sûr.

Il est tout à fait possible que tout cela ne soit lié d’aucune manière, et que ce soit seulement le fruit de l’imagination malade de l’auteur de ces lignes. Mais voir Durant rejoindre les Warriors pour créer une «über-super-team» laisse entrevoir la possibilité que, peut-être, Kevin Durant n’a jamais complètement pardonné à la direction du club, et surtout à son propriétaire, d’avoir fait une croix aussi rapidement sur ce trio (la limite salariale ayant joué un rôle important dans la décision à l’époque) qui avait la capacité de se transformer en dynastie.

La malédiction des blessures

James Harden parti sous d’autres cieux, OKC a toutefois réussi à se maintenir parmi l’élite de la NBA grâce à la force de frappe de Russell Westbrook et Kevin Durant. Mais aussi de Serge Ibaka, qui est le joueur que le Thunder a finalement préféré à Harden en lui offrant un contrat en 2012, soit l'année où le barbu était envoyé au Texas. Mais comme cela arrive souvent en NBA, les blessures sont venues jouer les trouble-fêtes dans l’effectif du Thunder. En 2013, au premier tour des playoffs, Russell Westbrook se blesse (face aux Rockets ironiquement) au genou et est contraint de subir plusieurs opérations. OKC s’inclinera 4-1 face aux Grizzlies en demi-finale de conférence Ouest.

En 2014, c’est au tour de Serge Ibaka de se blesser lors du Game 6 face aux Clippers en demi-finale de conférence Ouest. Il manquera les deux premiers matches face aux Spurs au tour suivant, empêchant le Thunder de fonctionner à plein régime face à une équipe de San Antonio au sommet de son art (comme ils le démontreront en finale NBA face au Heat). En 2015, c’est Kevin Durant lui-même qui a vécu une saison quasiment blanche en raison d’une fracture au pied. Cette année-là, le Thunder ne s’était même pas qualifié pour les playoffs. Kevin Durant en a eu-t-il marre de voir le destin s’acharner sur le Thunder ? Une chose est certaine, les blessures ont largement contrarié l’évolution du Thunder ces dernières années.

Le Game 6 des Finales de conférence Ouest (et les NBA Finals)

Le Thunder était si proche. Arrivée en playoffs avec plus de questions que de certitudes, la franchise d’OKC a eu une révélation lors de sa série face aux Spurs de San Antonio. Tout à coup, la défense était hermétique, et l’attaque d’une fluidité rare pour une équipe plus connue pour les exploits individuels de ses stars que pour la beauté de son jeu collectif.

Opposé aux Golden State Warriors en finale de conférence Ouest, le Thunder a créé la surprise en prenant un avantage considérable, 3 manches à 1, face aux champions en titre. Mais une avalanche de trois points de Klay Thompson lors du Game 6 (qui a battu le record de trois points inscrits dans un match de playoffs ce soir-là) a permis à Golden State de revenir à égalité, avant de finalement l’emporter à domicile le match suivant. Personne ne le savait alors, mais Kevin Durant venait de porter pour la dernière fois le maillot du Thunder dans l’antre du Chesapeake Arena.

Ereintés par leur duel face à OKC, et avec Draymond Green à une faute flagrante d’une suspension, les Warriors finiront par plier face aux Cavaliers de Cleveland en finale NBA.

Kevin Durant aurait-il changé d’équipe si le Thunder avait remporté ce Game 6 et atteint les NBA Finals ? Ou si les Warriors avaient remporté le titre pour la deuxième année consécutive face aux Cavaliers ? Les fans du Thunder n’ont pas fini de ruminer. 

L’ombre de Jerry West

Cet homme est une légende. En 1996, Jerry West est celui qui avait convaincu Shaquille O’Neal de quitter Orlando pour venir poser ses valises à Los Angeles. Et on sait tous ce qui s’est passé ensuite. Dans le microcosme de la ligue, l’ancienne gloire des Lakers impose le respect par ses qualités de jugement (c’est lui qui a également poussé les Lakers a échanger Vlade Divac aux Hornets pour recruter un certain Kobe Bryant lors de la Draft '96).

Quand la nouvelle s’est répandue sur le fait que Jerry West avait eu une conversation téléphonique avec Kevin Durant le lendemain de son entrevue avec les représentants des Warriors dans les Hamptons, certains n’ont pas pu s’empêcher de prédire que ce simple coup de fil pouvait tout changer pour Golden State. Et apparemment, l’avenir leur a donné raison.

L’impact de Russell Westbrook ?

Pour les fans du Thunder, une des pires conséquences de la décision de Kevin Durant est qu’elle vient mettre un terme à son association délicieusement imparfaite avec Russell Westbrook. Lors de sa récente conférence de presse à propos du départ de KD pour Golden State, Sam Presti, le général manager du Thunder, a avoué que Nick Collison et Russell Westbrook s’étaient entretenus avec Durant quelques jours avant le début de ses entretiens dans les Hamptons.

Dans les scénarios exposés dans la presse à propos d’un probable départ de Kevin Durant, plusieurs faisaient référence au rôle clef joué par Westbrook. Agent libre l’an prochain, le joueur a-t-il avoué à Durant qu’il ne comptait pas rester à OKC au-delà de son contrat ? Il n’est évidemment pas question ici d’accuser Russell Westbrook d’avoir acheté lui-même les billets d’avion de KD pour la Californie. Mais il n’est pas impossible que les deux joueurs aient réalisé que leur avenir ne se ferait pas ensemble au terme de leur entrevue.

Mise à jour : Selon Howard Beck, du site Bleacher Report, Kevin Durant était frustré depuis un moment par le jeu pratiqué par Russell Westbrook. «Il était frustré et avait l'impression que leur duo avait atteint ses limites» témoigne une personne proche de Durant. Le joueur souhaitait voir le Thunder pratiquer un jeu plus collectif, ce qui n'était pas le cas quand Scott Brooks était le coach (beacoup de jeu en isolation). Le recrutement de Billy Donovan l'an dernier avait amélioré les choses. Mais pas assez au goût de Kevin Durant.

Au final, peu importe. Dans les semaines, et les mois à venir, les témoignages de toutes les parties concernées nous permettront d'en savoir un peu plus sur les véritables motivations de Kevin Durant (plus que ce message rédigé par un publicitaire publié sur le site du Player’s Tribune). Et sur les rôles de chacun dans sa décision.

R.I.P Thunder !

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